Les drag queens Brandy Snap et Shanna Banana devaient donner une lecture pour les enfants à la Médiathèque de Toulouse. Face au soulèvement de groupuscules d’extrême-droite, la mairie a décidé de les réserver aux adultes. Les artistes dénoncent la censure…
On sait que quelque chose a mal tourné quand un mouvement identitaire d’extrême-droite crie victoire sur son compte Instagram. C’est pourtant le mot qui s’affiche en gros sur celui de Furie Française, “Mouvement de jeunesse communautaire toulousain & enraciné”, proche d’Éric Zemmour, depuis que la mairie de Toulouse a décidé de retoquer l’atelier de lecture pour les enfants par des drag queen… Depuis 5 jours déjà, les militants s’acharnaient sur l’événement prévu pour le 18 février, distribuant des tracts dans les rues de la ville et organisant une pétition, supprimée depuis. Dans une position en demi-teinte, Jean-Luc Moudenc dénonce désormais le groupuscule, appelle à sa dissolution, mais s’est senti obligé d’accéder à leur requête, transformant l’atelier en lecture réservée aux adultes.
Contre le harcèlement et la discrimination
Pourtant, depuis 5 ans déjà, Brandy Snap et Shanna Banana ont organisé des ateliers de ce type, choisissant des lectures qui mettent en avant des sujets de société. “Ces lectures s’adressent à tout public (petits et grands) et ont pour vocation de promouvoir l’acceptation de soi, des autres, le respect, la tolérance, la sensibilisation au harcèlement et toutes discriminations. De façon générale, le bien vivre ensemble.” expliquent-elles sur leurs réseaux sociaux. La lutte face à ces ateliers, par des mouvements d’extrême-droite, prend malheureusement de plus en plus d’ampleur. Initiée aux États-Unis, contre des animations similaires, c’est la première fois que le duo en fait les frais.
La lecture aura lieu !
“Pour nous, c’est nouveau », explique Shanna Banana à Chocolatine. « On travaille le plus souvent avec des organismes de quartier, c’est la première fois que la Médiathèque fait appel à nous et que nous avons une telle visibilité. Mais ce type de réaction de la part de groupes guidés par la peur et la haine de ce qui est différent a déjà eu lieu. Ce qu’ils décrivent dans leurs attaques ne correspond même pas à ce que nous faisons vraiment dans nos ateliers, ça ne les intéresse pas, ils nous en veulent simplement d’exister.”
Face à la décision de la mairie, les artistes passent de l’incompréhension à la révolte : “C’est paradoxal parce que dans la même annonce, ils condamnent l’extrémisme à notre encore et donnent finalement raison au groupuscule. Quand la mairie nous a programmé, ils savaient très bien ce qu’on faisait. Mais tout ça nous prouve que nos lectures sont plus que jamais nécessaires. Nous avons d’ailleurs décidé de maintenir une lecture ouverte à tout public ce jour-là, dans un autre lieu que la Médiathèque. Ça n’a aucun sens pour nous d’intervenir seulement devant des adultes.”
Le combat continue
Si la Médiathèque, qui dépend de la mairie, préfère ne pas communiquer en son nom propre, Shanna Banana nous explique que les organisateurs n’auraient rien contre l’idée de parvenir un jour à programmer ces ateliers. Le duo a décidé d’envoyer un courrier à M. Moudenc pour demander une entrevue et se faire expliquer les raisons de sa décision. D’ici là, une mobilisation est lancée par l’association Pride avec notamment une pétition pour défendre la liberté artistique.
Image 1 : Shanna Banana
Image 2 : © Amandineboscphotographe
